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Chapitres 10 à 13 et épilogue
10.
Arthur n’en revenait pas. Depuis le début de la semaine, il avait reçu plus d’une vingtaine de romans et nouvelles de tous genres pour le concours. La durée était de trois semaines pour participer, puis la délibération devait prendre un mois, mais s’il continuait à recevoir autant de participations, il lui faudrait bien plus de temps pour tout lire !
Son patron s’était amusé de cet engouement des participants, et devait avouer qu’il n’aurait jamais cru que le concours ait un tel succès.
Après avoir divisé les participations déjà reçues en deux tas, ils se plongèrent chacun dans leur lecture. Certains avaient du potentiel, d’autres était éliminés dès les premières lignes pour cause de fautes d’orthographe ou de syntaxe. Certains sujets étaient très sérieux, ou d’actualité alors que d’autres étaient beaucoup plus légers, voir même parfois assez loufoques.
Au bout du septième livres, Arthur commença le roman d’une certaine Luna intitulé Sourire dans le métro. A peine avait-il lu la première page, qu’il avait déjà compris qui était l’auteur. Il était totalement bouleversé de découvrir ce récit, écrit par la jeune fille triste du métro. Premièrement, évidemment, parce que la coïncidence était incroyable et qu’il en était le personnage principal, mais aussi parce que ce n’était pas un roman triste, bien au contraire. Elle avouait dans son texte avoir regretté de ne pas avoir accepté sa proposition, et surtout, elle réécrivait l’histoire d’une façon simple et délicate, pas du tout extravagante comme aurait pu le faire une autre personne. D’après ce qu’elle confiait dans ce roman, elle avait une image du bonheur à peu près similaire à la sienne : une famille, un emploi utile et passionnant, et une jolie histoire d’amour. Une vie simple, mais remplie de petites joies. Aussitôt il comprit qu’il ne pourrait pas être impartiale dans ce concours. Cependant, l’histoire était du genre “feel good”, digne d’une comédie romantique, exactement ce qu’aimeraient les jeunes qu’il essayait d’attirer dans sa boutique. Et surtout, il était bien écrit ! Elle avait un véritable style, bien à elle, et il n’y avait aucune faute d’orthographe. Petit à petit, il commençait à se dire que le destin existait peut-être…
Afin d’avoir un avis objectif, il décida tout de même de le faire lire à Jean, et il le mit donc sur le haut de sa pile, sans lui en toucher mot, pour ne pas l’influencer.
Le lendemain matin, Arthur essaya de tâter le terrain.
– Alors, tu as trouvé quelques pépites dans ton tas de romans ?
– Et bien, la plupart n’ont pas passé le test du premier chapitre. Dans les autres, certains pourraient être intéressants avec quelques ajustements, mais il y en a surtout deux qui m’ont interpellé. Le premier se passe à l’époque des esclaves aux Etats-Unis et de la guerre de Sécession. Un sujet sérieux, et un roman bien écrit. Je l’ai dévoré. Le second, me correspond beaucoup moins au niveau du sujet, mais si l’on cherche a attirer une clientèle jeune, il pourrait être idéal. C’est une comédie romantique qui commence dans le métro de Paris.
A ces mots, Arthur ne put s’empêcher de sourire, ce qui n’échappa pas à son patron qui lui demanda pourquoi cette réaction. Arthur entreprit donc de tout lui raconter. Jean, touché par cette histoire, et surtout par l’enthousiasme de son protégé, décida que pour le moment, le roman de Luna serait le favori. Mais il restait encore trois jours aux participants pour envoyer leurs romans, et il fallait donner sa chance à tout le monde.
11.
Depuis qu’elle avait envoyé son roman au concours des jeunes auteurs, Luna avait décidé de l’oublier quelques temps. En effet, son propriétaire lui avait fait savoir qu’il souhaitait récupérer l’appartement dans lequel elle vivait pour y faire des travaux, et il fallait donc qu’elle trouve rapidement un nouveau toit. Pendant un mois, elle passa donc ses soirées à éplucher les pages des sites de locations pour trouver un studio d’une vingtaine de mètres carrés. Elle souhaitait plus que tout rester du côté du 11ème arrondissement où elle se sentait bien, mais malheureusement, les prix étaient bien trop élevés pour une vendeuse en boulangerie. Elle visita donc des appartements dans d’autres quartiers. Mais soit le studio n’était pas du tout à son goût, soit le quartier était triste, sans commerce autour. Alors qu’elle commençait à désespérer, elle s’intéressa à un petit 21 mètres carrés, dans le 19ème. Elle n’était jamais allée dans cet arrondissement, et ne connaissait pas du tout la station de métro du coin. Elle décida donc de donner une chance à ce quartier inconnu.
Et ce fut le coup de coeur immédiat ! A peine sortie du métro, elle se retrouva sur une petite place avec une église. Il faisait beau, ce qui aidait à apprécier encore plus cet endroit. Pour aller à l’adresse, elle devait descendre une rue pleine de commerces en tout genre : poissonnier, boucher, boulanger, fromager, primeur… C’était tellement vivant. Elle se sentit presque euphorique ! Et le charme opéra encore plus une fois dans l’appartement. Il n’était pas incroyable, il n’avait ni balcon, ni baignoire (ses deux principaux critères) et il donnait sur rue, mais il avait été refait à neuf, et elle n’arrivait pas à sortir le quartier de sa tête. Elle signa donc dans la journée, et s’installa quelques jours plus tard.
Une fois relogée, Luna commença à repenser à son livre. La date fatidique des résultats approchait à grands pas : c’était dans 3 jours.
Et pour l’occasion, la librairie avait souhaité faire les choses en grand en organisant une soirée au cours de laquelle le gagnant serait annoncé.
Elle hésitait à y aller, et c’est finalement Joséphine qui la décida, en lui proposant de l’accompagner.
12.
C’était le jour J. Arthur avait proposé à son patron d’organiser une soirée de lancement afin de dévoiler l’auteur gagnant. Cela créerait, selon lui, un véritable buzz, et c’était surtout pour lui l’occasion de rencontrer Luna officiellement.
La librairie avait subi un grand ménage de printemps, et avait été décorée avec goût. Le livre gagnant avait été imprimé en une vingtaine d’exemplaires, et ils étaient installés sur la table principale, recouverts par un grand draps qui les cachait.
Vers 19h, les invités commençèrent à arriver. Luna, accompagnée de Joséphine, arriva vers 19h30. Il y avait déjà beaucoup de monde, elle en profita pour ne pas se faire remarquer, et s’installa dans un coin.
La tension était palpable. La plupart des gens présents avaient soumis leur écrit au concours, et souhaitaient bien évidemment gagner. Beaucoup essayaient de sonder Jean et Arthur, mais aucune information ne sortit de leur bouche. Arthur était d’ailleurs presque incapable de parler, tellement il était stressé à l’idée de rencontrer Luna. Il la cherchait du regard, mais ne la voyait pas, et était accaparé par les participants qui venaient lui parler de tous les côtés. À 20h30, Jean demanda le silence, il était temps d’annoncer le gagnant. Il commença tout d’abord par remercier les très nombreux participants, et évoqua quelques très bons romans parmi les nombreux reçus.
Luna n’était pas bien. Elle ne se sentait pas à sa place. Les romans qui étaient félicités parlaient de sujets sérieux, d’actualité, ou d’histoire. Elle, avec son petit roman à l’eau de rose, n’avait rien à faire là. Cependant, elle ne pouvait s’empêcher de ressentir cette petite boule de stress se former dans sa gorge.
Pour l’annonce du vainqueur, c’est Arthur qui prit la parole.
– Le gagnant du concours est en vérité une gagnante. Cette jeune femme n’a pas écrit sur des sujets importants, et l’histoire n’est pas pleine de suspens. Mais c’est une histoire sincère. Moitié réalité, moitié fiction. Une comédie romantique à la parisienne.
Les mains de Luna commençaient à être moites et sa gorge était sèche. Elle commençait à comprendre, mais continuait à se dire que ce ne pouvait pas être elle. Puis soudain, en regardant un peu mieux le jeune libraire, il lui sembla qu’il était familier.
– Et cette histoire m’a particulièrement touchée, car le destin a voulu que j’en sois le personnage principal.
Luna n’en crut pas ses oreilles. C’était lui. Le jeune homme du métro. Elle ne savait plus ou se mettre. Génée d’être au centre de l’attention, embarrassée de se rendre compte que son livre était tombé dans les mains d’Arthur, et surtout hébétée par une telle coïncidence.
– La jeune auteur de ce livre, je l’ai rencontrée l’année dernière dans le métro. Elle était très triste, et elle m’avait émue. J’étais donc allé la voir pour lui demander si tout allait bien, et savoir si elle voulait en discuter autour d’un café. Elle m’avait dit que non, que ça allait. Nous étions donc reparti chacun de notre côté. Et en lisant son roman, je me suis rendu compte qu’elle avait utilisé cette histoire comme le point de départ de son récit. Je vous présente donc la grande gagnante de notre concours de jeunes auteurs : Luna, et son livre Sourire dans le métro !
Jean retira le drap et découvrit la vingtaine d’exemplaires du livre de Luna, sous les yeux ébahis de celle-ci. C’est Joséphine qui réagit la première. Elle sauta de joie et félicita son amie de tout son coeur. Puis Luna comprit et, sous les applaudissement des invités, s’approcha lentement de la table pour admirer les couvertures des livres, avec le titre écrit dans de jolies lettres rouges. Elle eu besoin de déchiffrer chaque mot et d’observer longuement son nom écrit en bas pour comprendre, et enfin laisser couler quelques larmes de joie.
Autour d’elle, la plupart des gens, déçus de ne pas avoir gagné, s’étaient réfugiés autour du buffet et savouraient du champagne. Le temps que Luna se remette de ses émotions, Joséphine était partie leur chercher à chacune une coupe. Arthur s’approcha de la table. Cette fois encore, la fille du métro avait des larmes qui coulaient le long de ses joues. Mais cette fois, il comprit que c’était la joie qui débordait.
Luna leva les yeux et croisa ceux d’Arthur. Il lui fit un grand sourire, le même que cette fois là, dans le métro. Elle essuya rapidement ses yeux mouillés, et commença à bredouiller.
– Je m’appelle Luna, enchantée, et merci de m’avoir sélectionné.
– Quelle coïncidence n’est-ce pas ? J’ai à peine lu ton livre que j’ai compris que tu en étais l’auteur. J’ai été extrêmement ému. Tu sais, quand tu es sortie du métro l’année dernière, sur le papier que je t’ai donné, je voulais mettre mon numéro de téléphone, mais je n’en ai pas eu le temps.
– Oui, je m’en suis doutée…
– Et après, j’ai longtemps guetté dans le métro en espérant te recroiser.
– Oui mais j’ai changé de travail et donc de trajet quelques jours après.
– Je comprends mieux. En tout cas, je voulais te dire que ton livre est vraiment excellent, et c’est Jean, qui ne connaissait pas notre histoire, qui l’a choisit comme gagnant.
– Merci, cela me touche, même si je n’aurais jamais pensé être la gagnante.
– Au fait, moi c’est Arthur.
– Enchantée.
A ce moment là, Joséphine revint avec les deux coupes de champagne. Luna lui présenta Arthur comme étant le personnage principal de son livre.
Ils continuèrent à discuter tous les trois jusqu’à la fin de la soirée. Peu avant vingt-trois heures, Arthur pris Luna à part, et lui proposa d’aller boire un café le lendemain. Elle accepta avec joie.
13.
Quand elle arriva au café, le long des berges du Canal, elle l’aperçut, assit à une table. Il l’attendait, en lisant. Elle s’approcha, et dès qu’il la vit, un immense sourire chaleureux illumina son visage. Et aussitôt le charme opéra. Elle le trouvait beau, agréable et gentil. Elle s’assit et ils commandèrent chacun un verre de vin, et une planche à partager.
Au bout d’un moment, Arthur sorti deux exemplaires du livre de son sac.
– Hier soir, tu étais tellement étonnée d’avoir gagné, que tu n’as même pas pensé à emporter un exemplaire de ton livre. Je t’en ai donc apporté un. Et en voici un autre, que j’aimerais que tu me dédicaces. Prends ton temps, en attendant je vais commander deux autres verres.
Pendant qu’il s’absenta, Luna dédicaça le livre et sorti un papier de son sac, qu’elle inséra dans le livre. Puis elle le remit à la place d’Arthur. Il revint 2 minutes après. Il lui trouva un air malicieux, totalement irrésistible. Il hésita à ouvrir le livre, ne sachant si cela la gênerait qu’il lise la dédicace devant elle, mais le fit quand même. En ouvrant le livre, il y trouva un papier qu’il connaissait, un peu vieilli, avec, au milieu, un smiley dessiné au stabilo jaune fluo, et sur le livre, une petite phrase :
« Les petites attentions font les grands moments
Au sourire du métro,
Qui j’espère, me sourira tous les jours
Luna »
Epilogue
1 an et demi plus tard.
C’est le grand jour. Celui de l’ouverture du salon de thé bibliothèque d’Arthur et Luna.
Sobrement appelé Luna & Arthur, il attire le regard des passants, qui se demandent quel type de boutique va ouvrir ici. Le couple est surexcité. Depuis 8 mois qu’ils se sont lancés dans ce projet, ils ne pensent qu’à ce jour.
Tout est prêt. La vitrine est pleine de pâtisseries qui ont toutes l’air plus délicieuses les unes que les autres, la machine à café fume, et les tables sont parées de jolis bouquets de fleurs qui sentent bon le printemps. Au fond du salon, la grande bibliothèque est remplie à ras bord de livres divers et variés.
Aussi passionné l’un que l’autre, ils avaient décidé de se lancer dans ce projet un peu fou d’ouvrir une bibliothèque salon de thé à Bordeaux, dans une de ces petites rues pavées qui font le charme de la ville.
Luna, qui rêvait d’aller vivre dans cette ville qu’elle aimait tant, avait réussi à convaincre Arthur de quitter sa capitale adorée pour le sud ouest pour y monter leur propre commerce. Seule, Luna ne l’aurait jamais fait, mais avec le soutien sans faille d’Arthur, elle s’était sentie pousser des ailes, et vivait sur un petit nuage depuis leur (deuxième) rencontre.
Son livre avait eu un véritable succès, et cela lui avait permis de rassembler une partie des fonds nécessaires à ce projet. Il était maintenant disponible dans la plupart des librairies, et cela lui faisait toujours chaud au coeur de croiser quelqu’un en train de le lire. Le meilleur des compliments pour elle, était de les voir sourire pendant leur lecture.
9h, l’heure d’ouvrir. Dans un couinement métallique, le volet de fer se lève. Luna est prête à servir les premiers clients curieux et Arthur, dans son fauteuil en rotin, l’observe, heureux. Et dire que tout ça est parti d’un simple sourire dans le métro.
Et voilà comment se termine l’histoire de Luna et Arthur. J’avoue que ça me fait tout drôle d’avoir publié cette nouvelle très personnelle par ici.
J’espère vraiment que ce petit récit vous aura plu. N’hésitez pas à me laisser un commentaire pour me dire ce que vous en avez pensé ! 🙂
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